Un nouveau produit « d’hygiène féminine » vendu sur Internet est inutile et peut s’avérer dangereux, alertent les professionnels.
Un bâtonnet exfoliant destiné aux femmes pourrait nuire à la santé de ces dernières.
Trucs et Bricolages
Nous vivons à une époque qui se veut égalitaire entre les hommes et les femmes. Toutefois, quand on pense au-dessous de la ceinture, les femmes ont une pression « hygiénique » bien particulière… Comme si ce qui se trouve dans sa (jolie) culotte devait sentir la fleur délicate en tout temps, ne pas avoir de poils disgracieux et avoir une esthétique « parfaite ». C’est ce que de nombreux produits ou offres de chirurgies esthétiques voudraient nous faire croire, en tout cas.
Un nouveau produit destiné aux femmes vient en ajouter une couche. Ainsi, après les douches internes, les bains de vapeur et les infusions vaginales tellement appréciées par Gwyneth Paltrow (et qu’il ne faut pas faire!), les conseils farfelus (comme celui de mettre du persil dans son vagin!), voici le Jamu Stick.
Ce produit est en fait un bâtonnet exfoliant pour… le vagin. Eh oui! Après l’exfoliation du visage et de toute la peau du corps, on vise l’exfoliation interne!
Ce dispositif servirait à débarrasser le vagin de ses peaux mortes, des sécrétions malodorantes et permettrait au passage (sans jeu de mots!) de le rajeunir et le resserrer. Un bonus pour la sexualité… des partenaires des utilisatrices, vante-t-on sur le site!
Ce produit vient s’ajouter à la très longue liste de produit qui viennent tenter de nous convaincre, à grands coups de slogans et de publicité, que la vulve et le vagin on besoin d’être bien nettoyés et méritent toujours « plus de fraîcheur ».
Pourtant, le sexe féminin n’est pas sale et n’a pas besoin de ces produits et gadgets qui augmentent la pression, coûtent cher et peuvent être nuisibles à la santé des femmes.
La compagnie indonésienne qui a mis le Jamu Stick sur le marché promet que ce produit permet d’exfolier le vagin pour le débarrasser de ses peaux mortes.
Mais il est impératif de savoir que le fait de s’exfolier la muqueuse vaginale n’est pas du tout nécessaire, mais est surtout dangereux pour la santé.
«Le vagin est un organe autonettoyant, c’est comme les fours à pyrolyse : il se lave tout seul, les cellules et les impuretés s’éliminent naturellement», explique la Dre Odile Bagot, gynécologue, auteure de Vagin et Cie , on vous dit tout ! (Mango éd.) et du blogue Mam Gynéco..
Se laver une fois par jour avec un savon doux suffit à prendre soin de son intimité. Et on parle bien ici de lavage externe! On ne doit surtout pas pratiquer de lavage interne des muqueuses vaginales! Cette pratique peut déséquilibrer le microbiote vaginal et cette flore est composée à 90 % de lactobacilles, des bonnes bactéries qui assurent le bon équilibre de ce milieu fragile qui, quand tout va bien, peut tolérer la présence de quelques germes et champignons. On n’exfolie aucune muqueuse du corps, donc, pourquoi vouloir le faire avec la muqueuse vaginale?
Lorsque le vagin est malodorant, c’est le signe d’un déséquilibre de la flore vaginale, ce qui peut entraîner des infections de type mycose ou vaginose. Et il n’y a rien de pire pour ces lactobacilles qu’un nettoyage interne du vagin, qui vient bouleverser leur équilibre.
Autre promesse ridicule au sujet de ce bâtonnet: il resserrerait le vagin et ainsi les époux des utilisatrices « n’ont ainsi plus à songer à un élargissement du pénis »!
Or, la Dre Bagot explique que le vagin ne se resserre pas; c’est le périnée qui se resserre. D’après elle, un dispositif comme le Jamu Stick peut faire craindre une abrasion qui assèchera les muqueuses, qui sont ainsi moins lubrifiées. Cela pourrait donner au partenaire la sensation que le vagin est plus resserré, mais c’est en réalité le signe d’une sécheresse vaginale qui entraînerait surtout brûlure et inconfort pour la femme…
Mais comment fonctionne ce dangereux Jamu Stick? Ce bâtonnet de forme phallique mesure 12,5 cm de long et 2,5 cm de large s’insère dans le vagin. Il est composé d’herbes naturelles, de kaolin, de grenade, de galles de chêne aux propriétés supposément« hautement astringentes » ou encore de pierre d’alun. Le Jamu Stick promet une exfoliation naturelle de la paroi vaginale.
Mais « la composition de ce produit en fait un sensibilisant potentiel », avertit le Pr Nicolas Dupin, le dermatologue responsable du Centre de santé sexuelle de l'Hôtel-Dieu de Paris et auteur de du livre Mon amie la peau (éd. JC Lattès).
« C’est dangereux : dès lors qu’on exfolie une muqueuse, cela signifie qu’il y a une abrasion. Cela peut déclencher les mécanismes allergiques et provoquer eczéma et affection immuno-allergique », alerte-t-il.
« La composition de ce produit provoque une abrasion chimique du vagin, c’est extrêmement nocif. C’est d’autant plus alarmant que la paroi vaginale est extrêmement perméable et constitue à ce titre une voie redoutablement efficace d’administration médicamenteuse, en atteste l’anneau vaginal contraceptif. Ainsi, toutes les cochonneries chimiques contenues dans ce bâtonnet peuvent passer directement dans le sang par voie transmuqueuse », s’inquiète la Dre Bagot.
Comme si ce n’était pas suffisant, ce bâtonnet peut réserver d’autres mauvaises surprises. En endommageant la muqueuse vaginale, ce produit peut augmenter les risques de contracter une infection transmissible sexuellement (ITS).
Encore plus, le site indonésien propose une large gamme de bâtonnets pour personnaliser vos achats. Tous les bâtons (au prix d'environ 28$) contiennent les ingrédients du modèle original et un ingrédient en plus, par exemple des pétales de roses séchées. Ceci dans le but de vous parfumer les partie à votre goût…
Nous le répétons, ce genre de produits n’est aucunement nécessaire. Un savon doux intime peut être utile lorsqu’une femme est sujette aux infections à répétition, à des irritations vulvaires. Mais la femme n’a pas besoin de tous ces produits d’hygiène intime à l’effet potentiellement contre-productif et dangereux.
Un vagin en bonne santé n’a pas d’odeur, donc on oublie tous les déodorants intimes et autres protections périodiques parfumées », rappelle la Dre Bagot.